Les personnages de la pièce


Ces personnages, en commerce quotidien avec la mort, ont besoin de vivre intensément.

 

Pour se mettre dans le bain, on peut lancer la musique ci-dessous dans une autre fenêtre :
Nina Simone is feeling good
The Arcade Fire fait souffler son vent froid : fin de la pièce

 

Les personnages principaux, dans l’ordre d’apparition :

Nathaniel Fischer, le croque-mort en chemise à fleurs

Nathaniel Fisher est le père de famille et le chef de l’entreprise Fisher & Sons. Dès la première scène, il meurt d’un accident tragique, laissant toute la famille entre incrédulité et affolement. Il reste au cœur de l’intrigue, réorganise toute la vie de sa famille après sa mort à travers son testament et réapparaît constamment dans les pensées de ses enfants et de son épouse, pour les remettre à leur place, les féliciter ou leur lancer des défis. Difficile de bien connaître cette personnalité dont chacun se réapproprie le souvenir à sa façon. Mais d’après ce que l’on peut comprendre, c’était un homme à la fois épicurien, droit dans ses bottes et intransigeant. Intègre avec ses clients, sévère avec ses enfants, parfois moqueur, Nathaniel Fisher semblait habitué à donner des ordres sans lever la voix, le regard noir et le sourire aux lèvres. Attaché à la pérennité de son entreprise et à la solidité de sa famille, ce père de famille semblait toujours guidé par la morale et la bienveillance à l’égard de ses proches.

 

Ruth Fischer, le Stromboli endormi

C’est la mère de famille, veuve de Nathaniel Fisher. Ruth est une femme d’apparence austère et rigide. Ses cheveux sont souvent relevés en chignon, son chemisier est boutonné jusqu’au cou et ses lèvres sont aussi pincées que ses jupons. Mère au foyer, elle ne pense, avant la mort de son époux, qu’à la bonne santé, à la bonne tenue et au bon respect des valeurs catholiques de sa famille. A la mort de Nathaniel, Ruth se révèlera totalement étrangère à elle-même, égarée et curieuse de se découvrir. Au fil de ses expériences émotionnelles, de ses liaisons avec son coiffeur Hiram et avec son fleuriste russe Nikolaï, on accompagne le cheminement et la libération d’une femme tiraillée entre le deuil de son époux et la découverte de sa féminité.

 

Nate Fischer, l’hédoniste au coeur fragile

Nate est le fils aîné de la famille Fisher. Lorsque s’ouvre la pièce, il a 35 ans et vit encore comme un étudiant à Seattle, loin du climat sinistre de sa famille, au milieu des fêtes, des filles d’un soir et du sport. La mort de son père va bouleverser sa vie. D’abord en l’obligeant à retirer ses œillères pour affronter la gravité du réel. Puis en le confrontant à sa famille qu’il avait toujours cherché à fuir. Et enfin en le forçant à acquérir quelques raisonnements plus responsables en co-gérant, avec son frère David, l’entreprise familiale. Au même moment, Nate rencontre Brenda, belle jeune femme mystérieuse et intelligente, entrée dans sa vie le jour de la mort de son père et s’attache à elle. Séducteur et hédoniste comme son père, Nate ne peut brutalement plus se permettre d’enterrer ses sentiments, ses questionnements et sa profondeur, comme il l’avait toujours fait.

 

Brenda Chenowith, la masseuse des âmes et des coeurs

Brenda est la petite amie de Nate, rencontrée dans l’avion le jour même de la mort du père Fisher. Abordée au départ comme une simple aventure sexuelle, elle acquiert, à la faveur des événements, une importance immédiate dans la vie de Nate et une densité énigmatique, que Nate ne parviendra jamais tout à fait à élucider.

Comme on le comprendra au fil de la pièce, Brenda était une enfant surdouée, confiée, toute son enfance, à un psychiatre de renom qui l’a étudiée comme un rat de laboratoire. Devenue professionnelle du massage shiatsu, spirituelle et sensuelle, elle a gardé de cette  expérience une fragilité, une défiance absolue à l’égard d’autrui et un certain narcissisme. Elle ne peut s’empêcher de porter un regard clinique sur les personnes qui l’entourent et de les percer à vif dans chacune de leurs intentions. Son talon d’Achille ? : son frère maniaco-dépressif, Billy, à qui elle tient comme à la prunelle de ses yeux


 

David Fischer, le rabat-joie sensible

Tout  comme sa mère, David est en apparence bon sous tous rapports, terriblement coincé et rébarbatif. Les cheveux bien peignés, l’air condescendant, aigri, il se révèle très vite homosexuel refoulé, mal dans sa peau et semble obsédé à l’idée de satisfaire les volontés de ses parents, de se dévouer entièrement à l’entreprise de son père et à la paroisse que fréquente sa mère. Il n’a jamais imaginé une seconde qu’il pouvait, tout comme son frère Nate dont il est très jaloux, se pencher sur ses propres désirs. A la mort de son père, on le voit s’affranchir de ses autocensures, du dictat paternel autour de la virilité. D’abord en se laissant déborder par l’affirmation de sa marginalité, puis en acceptant progressivement son homosexualité. David reste une nature grave et tourmentée, mais son rapport aux autres et plus particulièrement à son frère s’adoucit.

 

Keith Charles, le protecteur

Keith est le petit-ami de David. Militaire et criminologue de formation, il est policier à Los Angeles et exerce son métier avec une grande rigueur morale. S’il fait preuve le plus souvent de tempérance et de sagesse, il lui arrive de disjoncter et d’utiliser sa force sans avertissement ni limite. Keith incarne la virilité parfaite, le fantasme cliché de toutes les femmes. Il n’a pourtant aucun mal à assumer son homosexualité et remet constamment David en cause à ce sujet. Un brin moralisateur, il aide David à se stabiliser et se révèle l’un des personnages les plus équilibrés de la pièce.

 

Claire Fischer, la jeunette au regard pénétrant

Claire est la petite dernière de la famille Fisher. A 17 ans, elle traverse une crise d’adolescence extrêmement profonde et atypique. Elle ne se contente pas de transgresser les interdits ou de prendre sa mère de haut. Elle affronte aussi les questionnements existentiels de l’ennui, du temps et de la mort. Par ailleurs, elle s’exclue des groupes de jeunes de son âge en se montrant sous ses aspects les plus étranges et les plus morbides. Qui voudrait fréquenter la fille qui vient à l’école en conduisant un corbillard repeint en vert ? Son seul ami, Gabriel, est un adolescent très perturbé lui aussi, toujours empêtré dans de sombres histoires de mort, de crime ou de drogue. Claire voudrait l’aider, le sauver, mais elle n’y parvient pas et s’en accable elle-même. Encore une preuve, confie-t-elle un jour à son psy, de l’ombre funeste qui plane tout autour d’elle.

Pourtant, Claire n’est pas aussi sombre, cynique et renfermée qu’elle ne l’affirme. C’est aussi une jeune fille sensible qui se laisse parfois frôler par les premiers émois que l’on ressent à son âge. Ces rares instants de légèretés amoureuses ou de rires sont d’autant plus émouvants qu’ils semblent la surprendre elle-même au milieu de ses propres désillusions.


Nikolaï, l’homme bouquet de saveurs slaves
Propriétaire d’une boutique de fleurs appelée Blossom Flower Shop d’Amour, Nikolaï est le petit ami/employeur de Ruth et certainement le personnage le plus lumineux de la pièce. Immigré pudique qui dissimule ses blessures intimes à merveille, il est surtout un bon vivant au ventre rebondi qui déborde de joie de vivre et de gourmandise. Nostalgique d’une famille laissée en Russie dont on ne saura pas grand-chose, Nikolaï a le cœur sur la main et n’aime rien de plus que les grandes tablées familiales pour boire, manger, rire et chanter. C’est ainsi qu’il parviendra, de façon totalement inattendue, à séduire la mère Fisher. Il gagnera sa confiance, entretiendra avec elle une relation de plus en plus complice et affectueuse, l’aidera à se rapprocher de ses enfants. Et accomplira même un miracle : celui de révéler à cette veuve éplorée sa féminité enfouie.


Fréderico Diaz, le Michel-Ange de l’embaumement

Federico est le thanatopracteur, employé par l’entreprise Fisher & Sons. Son travail consiste à restaurer les corps et à les embaumer pour qu’ils soient présentables au moment de la cérémonie. Mais pour lui, ce n’est pas un simple métier, c’est un art qu’il pratique avec talent et exaltation, comme si les corps pouvaient miraculeusement renaître sous ses doigts. Même lorsqu’un cadavre lui arrive en morceaux, Rico parvient à le reconstruire et à lui rendre son apparence d’origine. Jeune père de famille, fou amoureux de son épouse et de ses enfants, Rico est aussi un jeune homme rieur qui a choisi la vie. D’origine modeste, il espère devenir l’associé des frères Fisher et voir son salaire réévalué à la hauteur de son talent. Cette revendication donne lieu à d’importants dilemmes puisque l’entreprise ennemie Kroener, un conglomérat qui ne cherche que le profit et la fermeture des indépendants, ne cesse de lui faire de l’œil en lui proposant des salaires alléchants.

 

Vanessa Diaz, la compagne dévouée et ambitieuse

Vanessa Diaz est la compagne de Rico. Issue d’une famille modeste, elle-même mère au foyer, Vanessa est une épouse aimante et bienveillante, qui soutient son mari en toute circonstance et croit en son talent. Anxieuse et ambitieuse de nature, elle se révèle aussi une femme de poigne qui ne cesse de pousser Rico au travail, tout en lui faisant sentir la difficulté qu’elle éprouve à élever ses deux fils seule. Très influencé par Vanessa, Rico s’épuise à la tâche tout en culpabilisant de ne pouvoir l’aider davantage à la maison.

Billy Chenowith, le grand enfant écorché vif

Billy est le frère de Brenda. Photographe, artiste fou, charmeur, il peut être très attirant … quand il prend ses médicaments. Imprévisible et maniaco-dépressif, il se révèle totalement inadapté au monde qui l’entoure. Il est le seul personnage de la pièce dont la névrose soit pathologique et extériorisée. Entre fou rire et crises de sanglot, Billy se laisse parfois dépasser par ses émotions et par ses démences. Habitué à disposer de sa sœur comme d’une béquille entièrement dévouée à ses états d’âme, Billy souffre beaucoup de la voir tomber amoureuse de Nate et n’hésite pas à manifester sa jalousie en se montrant de plus en plus envahissant. Devenu violent, Billy est interné en hôpital psychiatrique.

 

Margareth Chenowith, le requin marteau au brushing impeccable

Margareth est la mère de Brenda et Billy. Elle est psychologue, très belle femme et consciente de son pouvoir de séduction. L’immense propriété qu’elle occupe avec son mari à Los Angeles prouve la réussite du couple. Mais tout cela ne l’empêche pas d’être dépressive, alcoolique et d’entretenir des relations terriblement malsaines avec sa fille, son fils et son époux. Narcissique, méprisante, prise de fou rire dès que sa fille accomplit un pas dans la vie et à moitié indifférente à l’égard de la maladie de son fils, Margareth est l’archétype de la « méchante ». Naturellement, elle se révèle par plusieurs aspects plus malheureuse que malveillante.

 

Sarah O’Connor, l’illuminée au coeur lourd

Sarah O’Connor est la sœur cadette de Ruth Fisher. Pourtant, difficile d’imaginer deux personnalités plus antinomiques. Artiste bohème dans l’âme, adepte de pratiques de relaxations orientales étranges recueillies au cours de ses nombreux voyages dans le monde entier, Sarah est obsédée par la jeunesse, la beauté, le bien-être de son corps et de son esprit. La maison reculée dans laquelle elle vit, au milieu des bois, est le siège de réunions ésotériques totalement extravagantes entre artistes célèbres. Guidée par des envies légères depuis son plus jeune âge, Sarah suscite de terribles jalousies et rancœurs chez sa sœur Ruth. Il suffit pourtant de regarder ou d’écouter Sarah de plus près pour comprendre que de terribles épreuves ont jalonné sa vie et que cette femme au corps de jeune fille et aux mouvements sereins n’a qu’une piètre estime d’elle-même : celle d’une artiste sans talent.

 

Parker, la nymphomane rebelle

Parker est une gosse de riches, lycéenne rebelle qui vient d’une école privée. Elle sera la seule personne du lycée à accepter de fréquenter Claire sans se moquer d’elle. Pourtant, rien ne laissait présager une telle amitié. Extrêmement assumée dans sa féminité – à la limite du vulgaire –, apprêtée comme un sex-toy humain, les seins en avant, les jambes filiformes et le regard de peste, Carol est la fille populaire du lycée. Obsédée par les « mecs », le sexe et les fringues, elle ressemble traits pour traits au genre de fille que Claire déteste. Leur rapprochement, dû au départ à la singularité de Claire qui fascinait Parker, a permis à l’une comme à l’autre de s’ouvrir et d’explorer des parties de leur sensibilité qu’elles ignoraient. Parker apporte à Claire de la liberté et de l’audace.

4 Comments

  1. WordPress » Erreur

    Il y a eu une erreur critique sur ce site.

    En apprendre plus sur le débogage de WordPress.