Filmographie
Le Langage Du Temps

De cette collection de mots capturés en vrac ressort un rapport à la temporalité qui rejoint, je crois, ce que peut raconter le film, et plus largement ce que voudrait mettre en relief le travail de Julien Lahmi autour du cinéma de recyclage. Au sortir de la première projection, à l'image d'un instantané capturé dans l'immédiateté (d'une histoire à laquelle il manque encore le recul pour être racontée), les spectateurs livrent des mots épars et bruts, qui se rejoignent autour de l'universel, et de l'émotionnel. Ils semblent encore, littéralement, dans le film, sans distance.

Au sortir de la seconde projection, la forme même de l'expression des spectateurs commence à changer: les mots restent mais avec eux apparaissent des bouts de phrases, comme si la temporalité et le retour sur images pouvait faire naître un nouveau langage, ou bien le faire advenir véritablement. Le public sort du singulier et les mots reflètent une soudaine conscience du collectif, faisant appel à des références communes : celle d'une culture, celle de l'Histoire aussi.

C'est entre autre ce passage de la petite à la grande histoire qui se rejoue dans le cinéma de recyclage de Julien Lahmi : l'éclairage de la mémoire familiale ne peut se faire qu'une fois que l'acteur « existe » autrement que dans l'instant dont il est question.

L'équipe n'a pas été surprise par l'évolution des réponses des spectateurs. La temporalité de la conscience collective est comme le reflet de la temporalité nécessaire à l'appropriation d'une histoire intime.

Une même histoire peut devenir autre chose, tout en restant la même : comme le disait Ricoeur dans son immense travail sur l'interprétation, un même mot peut faire référence au « monde du texte », au « monde de l'oeuvre » et au monde tout court. Si l'histoire existe par elle-même, elle existe aussi par et pour les autres. La transformer en oeuvre fictionnelle, c'est lui donner sinon sa liberté, du moins une nouvelle liberté. Donner la parole aux spectateurs, deux fois de suite, c'est mettre en relief ce dont il s'agit dans le cinéma de recyclage de Julien Lahmi : le spectateur a beau être à l'extérieur de l'écran, il n'en demeure pas moins un acteur du monde dont il est question à l'écran. Et qu'est-ce que recycler des images familiales pour en faire des films, sinon « jouer » avec l'histoire, celle des acteurs inconscients, celle... du temps ?

Axelle Emden, 2012

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Synopsis

Intentions

Les Mots Des Autres

Le Langage Du Temps

Bande Ambiance