Intentions de mise en scène


« Ce n’est pas que j’ai peur de la mort, c’est juste que je ne veux pas être là quand ça arrivera. » Woody Allen

 

La vie a un prix parce qu’elle a une fin. La mort n’en reste pas moins effrayante pour nous autres, les êtres humains. La mort est le quotidien de la famille Fisher, c’est même leur gagne pain. Il sont donc bien obligés de l’aborder avec recul.

 

Mais ce stoïcisme imposé s’ébrèche souvent pour laisser place à l’hystérie. Cet environnement mortuaire exacerbe les pulsions de vie des personnages de la série. Il s’agit là de la folie ordinaire contenue en chacun de nous et qui explose ici, surtout avec tous ces psys qui habitent le coin (je pense en premier lieu au personnage de Brenda Chenowitch et à ses parents).

 

A l’instar de cette famille de croque-morts, je veux mettre la question du deuil au centre de la pièce. Je souhaite que les personnages – et les spectateurs dans leur sillage – se posent la question du « Comment je vis avec la mort ? Je l’accepte ou je me révolte ? »

Que m’apporte la perte d’un être cher, de mon père, de mon mari ? Ai-je su lui dire que je l’aimais quand il était vivant ? La mort de Nathaniel Sr, si aimé et regretté soit-il, n’aurait-il pas libéré d’un certain poids sa femme et ses enfants  ?

 

Que provoque le deuil de ces inconnus qui viennent pleurer dans le giron de Nate, de David ou de Ruth Fisher ? Cela n’incite-t-il pas Nate à faire l’amour plus avidement à sa compagne pendant qu’il en est encore temps ? Les relations amoureuses, la sensualité et la sexualité seront la chair de la pièce.

 

Pour montrer l’antagonisme entre ce long processus de deuil et cette vive douleur ponctuelle de la perte, je travaillerai sur le rythme. Le recueillement sera rendu par des scènes amples dans leur durée et un dénuement du décor scénique. Quant au besoin de crier sa peine, il se fera par un enchevêtrement de courtes scènes se déroulant simultanément dans différents lieux rendus concrets grâce à un jeu de lumière en douches.

 

Par ailleurs, l’art de la Série a apporté au Cinéma la proximité affective grâce à la longueur de son format. Le spectateur passe plus de temps en compagnie de Claire (Fischer), de Keith (Charles) et de Rico (Diaz) qu’il n’a pu le faire avec une Scarlett O’Hara, un John Merrick ou une Marquise de Merteuil. Quand j’ai fini le dernier épisode de la dernière saison de Six Feet Under, j’ai été pris par le sentiment surnaturel de dire adieu à des amis.

Pour donner au spectateur ce sentiment d’intime, je souhaite utiliser les armes émotionnelles du théâtre et mettre en place des stratagèmes visuels et sonores :

Dans le cercueil exposé pour la veillée funèbre sera dissimulé une caméra reliée au vidéo projecteur. Ainsi, nous obtiendrons sur l’écran de fond de la salle des plans rapprochés des comédiens.

Entre certaines scènes seront laissés aux comédiens des moments libres d’improvisation où ils auront pour contrainte de se laisser aller à exprimer une émotion, sans mots, sur une musique ou sur du silence. Des transpositions des rêves et pensées privées des personnages exprimés en image dans la série.

 

Les morts parleront par l’entremise de voix préenregistrées qui entoureront sonorement les spectateurs. Lors des scènes chorales comme celle de l’enterrement du père, des spectateurs “amis” et/ou volontaires de dernière minute seront invités à rejoindre sur scène la foule des anonymes qui portent le deuil …. et casser ainsi la distance entre acteurs et spectateurs.

 

Certains lieux seront rendus concrets par l’immersion sonore (ex: son de la route lors d’une scène de discussion en voiture)

 

Je m’attacherai à bien différencier ce que les personnages montrent aux autres et ce qu’ils gardent à l’intérieur. Leur visage social sera rendu par un jeu naturaliste alors que leurs pensées secrètes s’exprimeront aux spectateurs par des exubérances.

 

Ces personnages en commerce avec la mort ont besoin de vivre intensément. Les scènes  se succéderont donc sans temps mort, sans noirs et sans entrées/sorties. Les comédiens seront sur scène d’un bout à l’autre de la pièce. Je compte d’ailleurs sur cet important effort physique pour les amener au lâcher prise.

 

Enfin, l’humour noir de la série devra être à tout prix conservé grâce au décalage de certaines situations, au tragique des événements et à la crudité des dialogues.

Ma bio post-mortem

Le synopsis de la pièce

 

 

 

 

 

 

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